Bookmakers est un podcast mensuel créé en mars 2020 par Richard Gaitet pour Arte Radio. Il propose aux écrivains et aux écrivaines de se raconter sur la longueur - décrypter leur façon de travailler, comprendre leur univers, déconstruire le mythe que « tout vient d’un coup » comme par magie. Avec le temps, Bookmakers s’est ouvert aux éditeurs. Richard peut alors aborder d’autres aspects de la chaine littéraire, et aussi parler argent… 

A l’occasion d’Arte Radio part en live au Palais de Tokyo, Richard Gaitet avait proposé d’assister à l’enregistrement de son podcast, non pas avec un auteur mais avec un éditeur. C’était sans compter la SNCF et ses grèves ! 


Alors ce dimanche soir, en remplacement, le boss d’Arte Radio Silvain Gire mène une rencontre avec le trio qui se cache derrière ce podcast littéraire : Richard Gaitet (auteur), Samuel Hirsch (réalisateur et compositeur) et Sara Monimart (réalisatrice et monteuse son). Et nous sommes ravis !!!

Une discussion passionnante et volubile au cours de laquelle Richard évoque avec fougue et émotion les coulisses, l’arrière-boutique de Bookmakers. Mais aussi certains questionnements étiques.


Bookmakers : un travail de fou

Il faut réaliser trois épisodes par invité. Et pour chaque invité Richard Gaitet s’immerge durant quatre à cinq semaines dans l’univers de l’auteur. « C’est plus ou moins compliqué : cela dépend notamment du nombre de livres à lire. Si c’est un auteur qui en a publié deux, c’est plus simple. » Richard lit toutes les oeuvres de ses invités pour préparer son interview . « J’épluche aussi toutes les interviews et entretiens que je trouve sur internet pour imaginer des questions qui permettront d’aller plus loin dans l’interview. J’écris environ soixante questions par invité. Après je fais le plan pour définir comment seront organisés les 3 épisodes. » Quel boulot pour quatre heures d’interview !  « J’ai de la chance, les auteurs acceptent de prendre autant de temps pour se confier. Et c’est miraculeux tout ce temps que me laisse Arte Radio » avoue Richard.


Bookmakers : un travail collectif 

On écoute un extrait d’un épisode consacré à Dany Laferrière. 

L’écrivain nous parle de son travail dangereux à l’usine, alors qu’il vient de débarquer à Montréal. 

Cette tranche de vie, Richard l’a obtenu grâce à l’oreille attentive de Sara. C’est elle qui gère les enregistrements des interviews. Ce jour-là, Richard était trop absorbé par l’interview. Dany Laferrière évoque simplement l’usine. Richard passe rapidement à la suite. C’est là, que Sara, remarque qu’une porte s’est ouverte et que Richard ne l’a pas empruntée. Alors elle interpelle Richard. C’est comme cela que Dany Laferrière, l’écrivain développe son travail dangereux dans cette usine. Le risque de se faire arracher un bras. Une tranche de vie qu’il n’avait jamais racontée.


Si l’interview est importante, la réalisation l’est tout autant. Samuel donne une âme supplémentaire à Bookmakers. C’est le créateur de la  fabuleuse musique du générique, que tout le monde adore. 

« En tant que réalisateur j’essaye de faire vivre le décor, ici l’usine. Il faut mettre l’auditeur dans l’univers de l’auteur par le son, le bruitage, la musique.», « Et ce n’est pas une musique pour éviter l’ennui, c’est une musique pour soutenir les propos. » ajoute Richard.


Si vous aimez ce genre de perles, des histoires intimes jamais racontées, nous vous invitons à écouter l’émotion de Lydie Salvayre mais aussi la folie créatrice de Bertrand Blier.

Bookmakers : on invite les copains ? 

Pour choisir un invité, Richard s’impose trois critères : 

- L’envie: « Il faut vraiment que ça me plaise sinon ça va être laborieux et ça va s’entendre. »

- La diversité : il faut des hommes, des femmes., des jeunes, des vieux. Tous les domaines de littérature : roman, science-fiction, livre pour les enfants, BD, et même scénario.

- La non-redondance : ne pas raconter les mêmes parcours, les mêmes manières de créer. 


Sur les 22 invités de Bookmakers, il n’y en a six qui sont devenus des amis. « Et ça me pose des questions de déontologie : est-ce que je suis toujours objectif avec eux? » La question s’est posée pour Maria Pourchet qui naviguait dans des cercles d’amis communs. « Son livre Feu est brillant, mais j’ai longtemps hésité. Et j’ai aussi pensé que ça pourrait donner un entretien intéressant, différent. Mais je ne me suis pas limité. Et j’ai pu nuancer sur ses autres écrits que je trouvais un peu en-dessous. » nous confie Richard.


Bookmakers : la littérature-passion

À l’inverse de ses podcasts, on découvre un auteur/interviewer très expansif. Durant cette heure, on perçoit l’amour que Richard donne à ses invités et le bonheur qu’il a de les recevoir dans son émission. « J’ai une chance folle, je suis à l’école avec les plus grands et les plus grandes de la littérature française. Je peux leur demander : je ne comprends pas comment vous avez fait cette page ? Moi je n’arrive pas à écrire ça, comment vous faites ? »

Allez, on vous livre un petit défaut de Richard : Richard a la phobie du montage ! 

« Je suis le seul auteur à Arte Radio qui ne monte pas. C’était une condition sine quoi none. Mais quand j’ai essayé d’apprendre le logiciel : en une heure, j’avais monté dix secondes. »


Cette justesse du mouvement de la parole et la douceur que nous ressentons à l’écoute de ces podcasts, on le doit à Sara, une réalisatrice monteuse. 


Ecouter Bookmakers est une expérience « cosy ». Feutrés dans nos plaids, on écoute ces auteurs et ces autrices nous raconter leurs chemins parcourus, leur  vision du monde, leurs vies intimes. Nous sommes impressionnés par la qualité de ces entretiens et la générosité de ces femmes et de ces hommes qui partagent avec nous, leurs vies d’écrivains et d’écrivaines.



Un récit d’Emmanuel Meneghini


Pour écouter les podcasts Bookmakers

https://www.arteradio.com/serie/bookmakers/1627


Le programme d’Arte Radio part en Live au Palais de Tokyo : 

https://palaisdetokyo.com/exposition/arte-radio-part-en-live/